Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le livre et la théière
Albums Photos
17 mai 2009

Hesse

"En effet, l'homme n'est pas une création stable et durable (comme l'affirmait l'idéal de l'Antiquité, malgré les visions contraires de ses sages). Il représente plutôt une tentative et une transition; il n'est rien d'autre qu'une passerelle étroite, périlleuse, entre la nature et l'esprit. Sa destinée la plus profonde le mène vers le monde spirituel, vers Dieu, sa nostalgie la plus ardente l'incite à retourner vers la nature, vers notre mère commune. Tels sont les deux pouvoirs entre lesquels son existence angoissée et tremblante le trouve ballottée. Ce que les gens entendent par la notion d'"être humain" se réduit toujours à une convention bourgeoise précaire. Celle-ci rejette et réprouve certains instincts extrêment brutaux; elle réclame une part de conscience, de civilité et de "désanimalisation"; enfin, elle ne se contente pas d'autoriser un soupçon d'esprit, elle l'exige. L'"homme" défini selon cette convention représente, comme tout idéal bourgeois, un compromis. C'est une entreprise timide, naïvement rusée, qui vise à empêcher aussi bien notre mère à tous: la nature mauvaise, que notre père à tous: l'esprit ennuyeux, de faire valoir leurs fortes exigences. Elle permet ainsi de vivre entre les deux, dans un espace intermédiaire où règne une atmosphère tiède. Voilà pourquoi le bourgeois accepte et tolère la "personnalité", tout en livrant celle-ci au Moloch que représente "l'Etat" et en se servant constamment de l'un pour lutter contre l'autre. Voila pourquoi aussi le bourgeois brûle aujourd'hui un hérétique ou pend un criminel auquel il élèvera demain des statues."

Le Loup des steppes

C

Publicité
Commentaires
Publicité
Archives
Publicité