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Le livre et la théière
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2 juillet 2012

Jünger

"Par de telles journées, au moment où le soleil est au zénith, nous aimions gagner la crête des falaises de marbre. Nous enjambions, sur le sentier aux serpents, les sombres hiéroglyphes des vipères fer de lance, et gravisssions les marches de l'escalier rocheux, éclatant de clarté. Parvenus sur l'arête extrême des falaises, qui se dressait dans l'ardeur méridienne et dominait les lointains de sa blancheur aveuglante, nous contemplions longuement le pays, et nos regards, dans chacun de ses plis, dans chaque sente, cherchaient des signes de ce qui le sauverait. C'était alors comme si nos yeux se dessillaient, et telles les choses qui vivent dans les poèmes, nous embrassions cette réalité dans sa splendeur impérissable. Et nous comprenions alors avec allégresse, que la destruction demeure étrangère aux éléments et que son illusion roule à leur surface pareille au flot des fantômes brumeux qui ne résistent point au soleil. Et nous pressentions: si nous vivions dans ces cellules qui sont indestructibles, alors, de chaque anéantissement nous sortirions comme on sort par les portes d'une salle de festin, pour d'autres salles toujours plus rayonnantes.

Souvent, dans nos stations au sommet des falaises de marbre, frère Othon disait que là même était le sens de la vie: recommencer la création dans le périssable, comme l'enfant répète en son jeu le travail paternel. Ce qui donnait leur sens aux semailles et à l'engendrement, à la construction, à l'ordre qu'on impose aux choses, à l'image et au poème, c'était qu'en eux la grande oeuvre se révélait, comme en autant de miroirs faits d'un cristal aux mille couleurs, qui bientôt se brise."

Sur les falaises de marbre

Copie_de_protobothrops_mucrosquamatus_web150606_021

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